L’interview en 5 questions de… Chloé Guillot Élouard

interview

Aujourd’hui, je vous propose de découvrir l’univers d’une autrice que j’apprécie énormément, sur le plan littéraire comme personnel : Chloé Guillot Élouard ! Je vous ai déjà chroniqué ses romans Irrégulières et Mémoires d’éléphant, et j’ai eu la chance de faire la bêta lecture de son prochain livre, Ma Grande… Alors c’est avec beaucoup d’émotion que je vous invite à faire connaissance avec elle… C’est parti !

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Question1

Irrégulières et Mémoires d’éléphant sont deux romans qui abordent des sujets forts, toujours de façon originale : la condition des femmes, la maternité parfois non désirée, le handicap, la mort… De quelle façon travaillez-vous ces thèmes et à quel public souhaitez-vous vous adresser ? Quel message, s’il y en a un, souhaitez-vous faire passer à travers vos romans ?

Il y a beaucoup de choses qui me révoltent mais je n’ai pas le courage des militants qui se lèvent et portent un message direct. Donc, je mise beaucoup sur l’empathie du lecteur ou de la lectrice en mettant en scène des histoires individuelles réalistes et souvent douloureuses. À mon avis, on peut avoir des préjugés sur un sujet si on le prend globalement mais dès lors qu’on est face à une personne bien définie, une histoire singulière, on est obligé de nuancer. C’est ça que j’essaye d’initier chez le lecteur ou la lectrice : regarder l’autre d’un peu plus près, avec honnêteté. Plutôt que faire passer un message, j’espère activer une émotion qui sera la graine d’un changement. J’utilise souvent des touches d’humour, pour offrir une respiration, un moment de recul entre deux vérités qui blessent : à mon sens, c’est terrible de quitter un livre en se sentant impuissant. Au contraire, on peut terminer sa lecture en se disant : « Tiens, et si j’ajustais un peu mon rapport aux autres et à moi-même ? » Dans un monde idéal, mes livres auraient un impact sur un public qui a besoin de changement. En réalité, mes lecteurs et lectrices sont pour beaucoup des gens déjà engagés dans la bienveillance. J’espère qu’ils trouvent du soutien dans mes histoires !

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L’écriture de votre prochain roman, Ma Grande, est déjà bien avancée. Que pouvez-vous nous dire de ce nouveau livre, afin de nous mettre un peu l’eau à la bouche ?

Je peux vous dire comment je le vois moi : comme une étoile filante, un récit bref mais qui brûle. J’ai voulu parler de certaines peurs et inquiétudes qui sont propres à la jeunesse d’aujourd’hui : les attentats, le rapport aux études et au travail et la dette affective qu’on peut contracter vis-à-vis de ses parents, de sa fratrie. C’est un récit assez intime et poétique, le temps d’une fugue à travers la France : un road-trip initiatique. Mon héroïne, Niloufar, va traverser la violence et faire des choix qui lui permettront de trouver sa juste place.

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Pouvez-vous nous parler de vos autres projets ? Quelles belles surprises nous attendent pour la suite ?

En parallèle de Ma Grande, j’écris une saga qui se passe aux États-Unis dans un contexte de fin du monde et qui parle du système de santé… Évidemment, la situation actuelle dans le monde bouleverse un peu mes idées ! Il y a aussi un autre roman, encore embryonnaire, qui se passera sous le soleil californien et qui parlera de grossophobie, de TCA (Troubles du Comportement Alimentaire) et d’acceptation de soi. Dans tous les cas, j’espère publier au moins un de ces romans en 2020 ! Du côté de la publication, j’aimerais basculer mes deux premiers romans sur une autre plateforme qu’Amazon. C’était très pratique quand j’ai commencé, à l’étranger, mais ça ne correspond pas vraiment à mes valeurs. Pour la même raison, je voudrais travailler avec un éditeur pour Ma Grande. Et enfin, je suis en train de collaborer avec un traducteur pour adapter Mémoires d’éléphant en anglais… Mais j’y pense aussi en version pièce de théâtre. Qui a dit qu’autrice, ce n’était pas un vrai métier ?

Question4

Vous êtes expatriée aux États-Unis. Parlez-nous un peu de la vie d’une autrice française à l’autre bout du monde… Dans quelle mesure cela joue-t-il sur le rapport que vous entretenez avec vos lecteurs et lectrices, mais aussi sur votre vision du monde et de la littérature ?

Cette expatriation a été un énorme tournant dans ma vie puisque c’est aux États-Unis que j’ai décidé de publier mes deux premiers romans. Ce n’était pas prémédité, mais ici l’auto-édition est plus reconnue qu’en France, donc je me suis lancée et j’ai beaucoup appris !
Ce qui me manque vraiment, c’est de rencontrer mes lecteurs français. C’est parfois frustrant d’échanger uniquement par Internet, il faut alimenter les réseaux sociaux, ça ne me semble pas toujours naturel et facile… Heureusement, je participe à des salons chez moi : prochain rendez-vous en juin, la Rencontre des auteurs francophones à New York (mais en ce moment, difficile de savoir ce qui sera maintenu ou pas dans les prochains mois…). Ensuite, retour définitif en France ! Du point de vue de la création, c’est clair que d’être entre deux cultures influence beaucoup ce que je fais : les Américains aiment les récits rythmés, directs, où les actions s’enchaînent alors qu’en France, beaucoup de romans sont plus introspectifs, psychologiques, prennent le temps de décortiquer les émotions. C’est d’ailleurs très lié, je pense, aux langues (l’américain très verbal et efficace vs le français plus passif et ciselé). Ça m’influence sur le fond et sur la forme, donc !

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Et, pour finir, nous traversons une période assez compliquée, puisque nous sommes tou.te.s confiné.e.s pour une durée indéterminée… Dans ces circonstances, la littérature et la culture peuvent être d’un grand réconfort. Avez-vous des oeuvres à nous conseiller ?

À lire : Je crois que la trilogie de Pierre Lemaître (Au-revoir là-haut, Couleurs de l’incendie, Miroir de nos peines) a un écho particulier avec notre situation, même si je n’aime pas qu’on utilise le vocabulaire de la guerre pour parler du COVID. Ce sont des romans brillants, pleins de justesse et de vérité sur la société humaine (nos lâchetés, nos coups d’éclats) ! Je recommande aussi à 200 % Les Pluies de Vincent Villeminot (une autre histoire de catastrophe mondiale traitée avec finesse). C’est l’occasion de découvrir la richesse de la littérature jeunesse !

À regarder : j’aime beaucoup la série « Il revient quand Bertrand ? » sur Arte.tv. C’est l’histoire d’un couple séparé à l’heure d’Internet où il est si facile de mettre en scène sa vie et ses sentiments… Maintenant qu’on est tous confinés, plantés devant nos ordis à la recherche d’un bon mot sur les réseaux, c’est encore plus savoureux à regarder !

À garder en tête : on n’est pas obligé d’être un héros en ce moment. On a le droit de se sentir triste, effrayé, en colère, dégoûté, vulnérable ou ralenti.

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Je remercie sincèrement Chloé Guillot Élouard de s’être prêtée au jeu de l’interview en 5 questions. Quel plaisir j’ai eu à découvrir ses réponses ! Autant vous dire que l’esprit qui ressort de cette interview me confirme le sentiment que j’ai eu à la lecture de ses romans, celui d’être entré dans l’univers d’une autrice qui est avant tout une très belle personne. Et j’espère vraiment la rencontrer à son retour en France, si l’envie est partagée !

Les chroniques de ses romans sont ici : Irrégulières / Mémoires d’éléphants.

Bonne lecture !

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#362 Mémoires d’éléphant – Chloé Guillot Élouard

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Le résumé…

Jimmy et Christopher n’auraient jamais dû se rencontrer. L’un est un ado raisonnable et anxieux, l’autre est un adulte rêveur, différent… et étroitement surveillé. Entre eux, un éléphant en peluche qui pourrait bien bouleverser le cours de leurs vies. Un roman tendre et cruel sur la différence, qui interroge notre rapport aux autres, à leur amour et à leurs exigences, par l’auteure d’Irrégulières.

Mon avis…

Vous souvenez-vous de Chloé Guillot Élouard ? Je vous avais parlé de son roman Irrégulières et… j’avais beaucoup aimé ! Cette année, elle revient avec un nouveau livre, un joli bébé : Mémoires d’éléphant. Déjà, première remarque : j’adore la couverture ! Je trouve qu’elle nous introduit parfaitement dans l’univers du roman : coloré, décalé et surprenant. Ici, nous suivons le jeune Jimmy, qui fait connaissance de façon complètement impromptue, sur le campus où travaille sa mère, avec un homme en pyjama, qui se balade avec une peluche d’éléphant. Il semble étrange, dans les nuages, mais gentil. Au début, ils ont peur tous les deux, puis ils s’apprivoisent. Mais la rencontre est de courte durée… Pourtant, ça ne s’arrête pas là. Jimmy est intrigué, et surtout : l’homme a perdu sa peluche, il faut la lui rendre !

À partir de là commence une aventure étonnante et pleine de rebondissements que l’on ne voit jamais venir. Je dois avouer que je me suis laissée complètement embarquer dans ce récit à la fois profond et farfelu. Beaucoup de thèmes importants sont évoqués, tels que la famille, le handicap, la tolérance, le harcèlement, la mort… Tout en douceur et en tendresse, Chloé Guillot Élouard nous prend par la main et nous raconte une belle histoire, dont on sort un peu grandi… ou rajeuni ? J’ai vraiment trouvé cette lecture rafraîchissante. J’ai apprécié le travail abouti sur la psychologie des personnages, l’intrigue très bien construite elle aussi… C’est touchant, c’est émouvant, et c’est aussi drôle parfois, malgré les sujets sérieux abordés. Je ne dirais pas, comme sur la quatrième de couverture, que c’est un récit « cruel », mais plutôt qu’il révèle, à travers la cruauté de certains personnages, ou à travers celle de la vie tout simplement, la beauté qui réside là où on ne l’attend pas

C’est un roman que je vous conseille vivement, et une autrice que je vous invite à découvrir, car elle le mérite ! Que vous soyez petit.e ou grand.e, ce livre peut vous plaire ! Voici son site internet et sa page Facebook. Vous pouvez trouver son livre ici. Foncez, vous ne le regretterez pas, parole de serial lectrice curieuse.

Carte d’identité du livre

Titre : Mémoires d’éléphant
Autrice : Chloé Guillot Elouard
Éditeur : autoédition
Date de parution : 16 février 2019

5 étoiles

Merci à Chloé Guillot Élouard pour cette lecture.

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#330 Irrégulières – Chloé Guillot Élouard

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Le résumé…

De la campagne d’après-guerre à la ville contemporaine, trois destins s’entremêlent.

D’abord, il y a Adélaïde, qui s’applique à effacer ses origines sociales. Puis Madeleine, jeune femme raisonnable étouffée par l’autorité parentale, et enfin Sophie, prête à tout pour faire carrière.

Trois héroïnes ordinaires qui aspirent à devenir maîtresses de leurs vies, face aux pressions collectives.

Mon avis…

Je dois l’avouer, je n’avais encore jamais lu de livre auto-édité. Mais il y a un début à tout, et Irrégulières me semble un parfait point de départ. A première vue, le résumé semblait en effet très prometteur tout en ne révélant que peu d’indices sur l’intrigue. Il est question, dans ce livre, de trois destins de femmes. Ces dernières sont, disons-le, banales, un peu comme nous toutes en réalité. Il s’agit de personnages que l’on pourrait tout à fait croiser, connaître, rencontrer, avoir dans sa famille. Le roman est très réaliste sur le plan de la psychologie. On n’a absolument aucun mal à se projeter dans les vies de ces femmes, à imaginer leur quotidien et les situations souvent difficiles auxquelles elles font face. Chloé Guillot Elouard nous décrit, à travers ces échantillons, les multiples obstacles auxquels sont confrontées les femmes dans tous les milieux sociaux, à toutes les époques. On se rend compte que, malgré leurs différences, elles doivent d’une certaine manière surmonter les mêmes épreuves, chacune à sa façon.

J’ai vraiment accroché aux trois intrigues, j’avais envie de savoir ce qu’il allait advenir de ces trois personnages. J’ai beaucoup aimé le mélange de banalité et de singularité de ces femmes, qui sont à la fois uniques dans leurs personnalités et réunies par les conditions qu’impose leur genre. En fait, ce roman est excellent à tous les niveaux, sur le plan des micro-histoires, celles d’Adélaïde, Madeleine et Sophie, et sur le plan de la macro-histoire, celle des femmes. Dans ce dernier aspect, le texte est féministe dans la mesure où il permet une réflexion sur le genre, sur la vie des femmes en France du XXe siècle à aujourd’hui. J’ai particulièrement aimé le personnage de Sophie, dans lequel j’avoue m’être reconnue sur certains points. Il s’agit d’une étudiante préparant sa thèse, confrontée à ses angoisses, aux attentes de la société, s’interrogeant sur ses propres désirs et volontés… Passionnant ! Je n’étais pas pour autant en reste avec Adélaïde et Madeleine qui ont elle aussi touché ma sensibilité.

J’ai donc eu une très agréable surprise avec Irrégulières. D’ailleurs, je tiens à souligner que le titre est très bien choisi, car il résume parfaitement le propos de ce roman. C’est un livre qui, véritablement, mérite d’être connu. Il est possible que certains points puissent déplaire à quelques lecteurs, comme la grande liberté que nous laisse l’autrice (ceux et celles qui ont déjà lu le roman me comprendront). C’est quelque chose que j’ai au contraire plutôt apprécié, car j’ai eu la sensation de continuer ma lecture encore bien après l’avoir fini ! Toutefois, un petit bémol pour moi : le thème de la maternité, assez présent à certains moments du roman, n’est pas celui qui me touche le plus, si bien que j’ai l’impression d’avoir « manqué » certains aspects. C’est tout de même une bonne expérience livresque que j’ai connue ici, car j’ai dévoré ce livre sans le lâcher, et il m’a laissé une excellente impression globale.

Carte d’identité du livre

Titre : Irrégulières
Autrice : Chloé Guillot Elouard
Éditeur : autoédité
Date de parution : 26 mai 2018

5 étoiles

Merci à Chloé Guillot Elouard pour cette lecture.

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