#402 Inexorable – Claire Favan

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Le résumé…

Vous ne rentrez pas dans le moule ? Ils sauront vous broyer.

Inexorables, les conséquences des mauvais choix d’un père.
Inexorable, le combat d’une mère pour protéger son fils.
Inexorable, le soupçon qui vous désigne comme l’éternel coupable.
Inexorable, la volonté de briser enfin l’engrenage…
Ils graissent les rouages de la société avec les larmes de nos enfants.

Mon avis…

Depuis ma lecture coup de coeur de son roman Le Tueur intime, je sais que Claire Favan est une valeur sûre dans le domaine du roman noir et du thriller. C’est donc avec un grand enthousiasme que j’ai ouvert Inexorable, après des mois sans avoir lu un roman, début de doctorat oblige… Et grand bien m’en a pris, puisque ce roman m’a procuré un très bon moment de lecture. Claire Favan aime beaucoup explorer les origines du mal, les mécanismes qui se cachent derrière les actions de ses personnages. Elle renouvelle ici l’expérience, avec l’histoire d’un jeune garçon, Milo, et de sa mère Alexandra. Il est difficile de rentrer dans les détails de l’intrigue sans gâcher le plaisir de la lecture. Néanmoins, je peux d’ores et déjà vous annoncer le postulat de départ : le père s’avère ne pas être réellement celui que sa femme et son fils imaginaient. Il commet une erreur fatale, qui bouleverse durablement la vie de chaque membre de la famille.

Inexorable, adj. (latin inexorabilis, de exorare, obtenir par prière) :

Qui est insensible aux prières, impitoyable ; à quoi l’on ne peut se soustraire.

Ce qui m’a beaucoup plu dans ce roman, c’est la subtilité de Claire Favan, qui s’attaque avec beaucoup de justesse aux caractères et aux personnalités de ses protagonistes. Elle prête attention à les doter d’une psychologie complexe et intéressante, en évitant le danger du « trop simpliste ». Néanmoins, chose surprenante, ce roman est beaucoup moins violent que ce à quoi Claire Favan nous avait habitués. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, car trop de brutalité aurait été malvenue – et gratuite ? – dans une telle intrigue. Elle met en évidence la tendresse du lien qui unit la mère et le fils, et interroge ainsi la complexité de la notion de « culpabilité ». Tout est amené avec délicatesse, et l’on sent que Claire Favan s’éloigne un peu, dans ce livre, de ses sources d’inspiration américaines très perceptibles dans Le Tueur intime par exemple.

À noter que Claire Favan a été accompagnée dans l’écriture de cet ouvrage par Olivier Norek (Entre deux mondes, Surface, Code 93), dont je ne peux que souligner la qualité et le réalisme des romans ! Évidemment, avec ou sans cette collaboration, l’autrice avait déjà prouvé son talent. Néanmoins, cela permet de voir l’émulation du milieu littéraire du roman noir actuel, riche en communications et en échanges, qui donne naissance à d’aussi bons textes. Ce qu’il faut souligner, c’est qu’Inexorable est idéal pour découvrir l’univers et l’écriture de Claire Favan. Étant plus « soft » que d’autres romans, il s’agit d’une bonne porte d’entrée pour son œuvre, que je conseille donc à des lecteurs et lectrices plus sensibles et curieux de se familiariser avec cette autrice sans se confronter à trop de violence. Pour ceux et celles que cela n’effraie pas, autant vous lancer dans Le Tueur intime, son premier roman.

Carte d’identité du livre

Titre : Inexorable
Autrice : Claire Favan
Éditeur : Pocket
Date de parution : 10 octobre 2019

5 étoiles

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#362 Mémoires d’éléphant – Chloé Guillot Élouard

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Le résumé…

Jimmy et Christopher n’auraient jamais dû se rencontrer. L’un est un ado raisonnable et anxieux, l’autre est un adulte rêveur, différent… et étroitement surveillé. Entre eux, un éléphant en peluche qui pourrait bien bouleverser le cours de leurs vies. Un roman tendre et cruel sur la différence, qui interroge notre rapport aux autres, à leur amour et à leurs exigences, par l’auteure d’Irrégulières.

Mon avis…

Vous souvenez-vous de Chloé Guillot Élouard ? Je vous avais parlé de son roman Irrégulières et… j’avais beaucoup aimé ! Cette année, elle revient avec un nouveau livre, un joli bébé : Mémoires d’éléphant. Déjà, première remarque : j’adore la couverture ! Je trouve qu’elle nous introduit parfaitement dans l’univers du roman : coloré, décalé et surprenant. Ici, nous suivons le jeune Jimmy, qui fait connaissance de façon complètement impromptue, sur le campus où travaille sa mère, avec un homme en pyjama, qui se balade avec une peluche d’éléphant. Il semble étrange, dans les nuages, mais gentil. Au début, ils ont peur tous les deux, puis ils s’apprivoisent. Mais la rencontre est de courte durée… Pourtant, ça ne s’arrête pas là. Jimmy est intrigué, et surtout : l’homme a perdu sa peluche, il faut la lui rendre !

À partir de là commence une aventure étonnante et pleine de rebondissements que l’on ne voit jamais venir. Je dois avouer que je me suis laissée complètement embarquer dans ce récit à la fois profond et farfelu. Beaucoup de thèmes importants sont évoqués, tels que la famille, le handicap, la tolérance, le harcèlement, la mort… Tout en douceur et en tendresse, Chloé Guillot Élouard nous prend par la main et nous raconte une belle histoire, dont on sort un peu grandi… ou rajeuni ? J’ai vraiment trouvé cette lecture rafraîchissante. J’ai apprécié le travail abouti sur la psychologie des personnages, l’intrigue très bien construite elle aussi… C’est touchant, c’est émouvant, et c’est aussi drôle parfois, malgré les sujets sérieux abordés. Je ne dirais pas, comme sur la quatrième de couverture, que c’est un récit « cruel », mais plutôt qu’il révèle, à travers la cruauté de certains personnages, ou à travers celle de la vie tout simplement, la beauté qui réside là où on ne l’attend pas

C’est un roman que je vous conseille vivement, et une autrice que je vous invite à découvrir, car elle le mérite ! Que vous soyez petit.e ou grand.e, ce livre peut vous plaire ! Voici son site internet et sa page Facebook. Vous pouvez trouver son livre ici. Foncez, vous ne le regretterez pas, parole de serial lectrice curieuse.

Carte d’identité du livre

Titre : Mémoires d’éléphant
Autrice : Chloé Guillot Elouard
Éditeur : autoédition
Date de parution : 16 février 2019

5 étoiles

Merci à Chloé Guillot Élouard pour cette lecture.

coeur

#337 Les prénoms épicènes – Amélie Nothomb

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Le résumé…

« La personne qui aime est toujours la plus forte. »

Mon avis…

Je n’étais pas sûre à 100% de lire le dernier Amélie Nothomb… et, finalement, je me suis quand même laissée tenter. Je ne sais pas pourquoi, il s’agit de l’autrice dont, même si elle ne me convainc pas toujours, je ne peux m’empêcher de lire les romans… J’avais apprécié, sans plus, celui de la précédente rentrée littéraire, Frappe-toi le cœur. Là encore, l’éditeur ne s’étend pas sur la quatrième couverture : rien ne sera dit de l’intrigue… Mais bon, on en apprend vite beaucoup plus si l’on ne vit pas dans une grotte ! Cette histoire fait en quelque sorte pendant à l’intrigue de Frappe-toi le cœur. On passe d’une relation mère-fille à une relation père-fille… Évidemment, les rapports humains sont toujours… particuliers… chez Nothomb, vous vous en doutez, ce n’est pas tout rose !

« Pourquoi avoir des remords de ne pas aimer qui ne l’aimait pas ? La question ne méritait aucun état d’âme. »

Au début, j’ai eu un peu peur car j’avais la drôle de sensation d’une histoire à la va-vite, un peu « bâclée », car la situation est exposée très rapidement, sans trop approfondir la psychologie des personnages… Ce choix s’explique plus loin dans le roman, heureusement. Passé cette mauvaise première impression, finalement on se prend à l’intrigue. En effet, j’ai plutôt trouvé l’ensemble assez « réaliste« . Je n’ai pas pu m’empêcher de m’identifier en partie au personnage principal, et de voir mon père dans le sien… En tout cas, on retrouve le talent de Nothomb pour construire des personnalités fortes. C’est donc, comme toujours, un roman bref et efficace que nous livre l’autrice. Les amateurs y trouveront évidemment leur compte, comme les curieux qui n’ont pas encore tenté l’expérience. Ceux qui attendent de l’originalité folle, cependant, seront déçus. Rien de sensationnellement nouveau dans ce roman, c’est du pur Nothomb, comme on l’aime (ou comme on le déteste).

Carte d’identité du livre

Titre : Les Prénoms épicènes
Autrice : Amélie Nothomb
Éditeur : Albin Michel
Date de parution : 22 août 2018

4 étoiles

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#324 Le magasin jaune – Marc Trévidic

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Le résumé…

Au début de l’année 1929, un jeune couple rachète un magasin de jouets en faillite dans le quartier de Pigalle. Gustave et Valentine pensent qu’à vendre le bonheur, on ne peut que le trouver soi-même. Ils repeignent la boutique couleur mimosa : le magasin jaune naît. C’est un soleil. Les parents et les enfants tournent autour ; les jouets s’animent ; la vitrine s’illumine. Les odeurs et les bruits de la rue meurent à sa porte.
Mais au-dehors, le monde change. La crise financière puis politique obscurcit tout. Arrivent la guerre, l’Occupation allemande.
Le Magasin jaune sera-t-il préservé de la violence et de l’horreur ? Ou n’est-il qu’une prison d’illusions et de mensonges ? Gustave s’y enferme et y garde ses secrets. Valentine veut s’en échapper. Les enfants, seuls, continuent de jouer le jeu, avec à leur tête la princesse du Magasin jaune. Ils recréent le monde, l’imitent parfois, mais toujours préfèrent l’innocence du rêve à la violence du cauchemar.
De 1929 à 1942, de l’Art déco aux chars d’assaut, de Cole Porter à la musique militaire, Le Magasin jaune retrace l’histoire d’un lieu où joies et désespoirs se succèdent, où la résignation fait place à la résistance, tandis que le regard énigmatique et froid d’Arlequin nous met en garde : le bonheur est fragile comme une poupée de porcelaine.

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Marc Trévidic

Mon avis…

Le Magasin jaune est un roman dont l’intrigue s’étend essentiellement de l’entre-deux guerre à la période de la Seconde Guerre mondiale. On retrouve cependant des échos de la Grande Guerre, à travers la figure du père de Gustave notamment, et Marc Trévidic suggère avec subtilité les liens qui unissent les deux conflits. Il nous montre ainsi que l’Histoire est en quelque sorte un cycle, un éternel recommencement. Il situe son intrigue dans un cadre original : celui d’un charmant magasin de jouet, symbolisant l’enfance et sa persistance dans l’âme de chacun. Ainsi, il nous fait le portrait d’une époque violente, en la mettant en regard avec un univers tout à la fois féérique et attendrissant. Marc Trévidic joue sur les contrastes. Certains personnages, adultes, restent jeunes au fond d’eux, gardent l’espoir. D’autres, parfois des enfants, incarnent la cruauté du XXe siècle. L’auteur n’hésite pas à concevoir des êtres de papier complexes sur le plan psychologique. Leurs actes sont parfois inattendus, imprévisibles, à la manière de vraies personnes. Cela les rend d’autant plus attachants qu’ils sont imparfaits, comme nous tous. C’est pourquoi le récit familial prend toute son ampleur ici, on a envie de suivre les aventures de ces personnages, de la famille Pilon et de tous ceux qui l’entourent, du début à la fin.

Dans ce livre, j’ai beaucoup apprécié le regard tendre que pose l’auteur sur le monde qu’il nous décrit. Il est animé par l’espoir, l’optimisme, malgré les horreurs décrites ou suggérées. On a en effet un portrait fidèle de l’atmosphère parisienne sous l’Occupation, avec des scènes parfois brutales et toujours réalistes. Mais il y a surtout, dans ce roman, de véritables incarnations de la résistance, ou plutôt des résistances sous toutes leurs formes ! J’ai aimé que l’auteur sache rendre compte de la complexité et de la variété des réactions dans une telle situation. Tous les personnages agissent différemment, et chacun a ses propres motivations, ses raisons, ses buts. L’amour est au coeur de tout, bien sûr. Vous allez me dire que ça peut avoir l’air idéaliste tout ça, et je vous dirais oui, peut-être un peu. Et alors ? Après tout, la littérature est aussi là pour nous montrer que la lumière est toujours là, quelque part, même dans l’obscurité la plus profonde. En parlant de la Seconde Guerre mondiale, Marc Trévidic nous parle aussi d’aujourd’hui, de notre propre époque, de nous-mêmes. En bref, c’est un récit simple, fluide, tout à fait prenant, aux significations belles et profondes.

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En quelques mots…

parcours d’une famille
quand l’enfance rencontre l’horreur
résistance(s)
une très belle écriture
la petite histoire dans l’Histoire

Carte d’identité du livre

Titre : Le magasin jaune
Autrice : Marc Trévidic
Éditeur : JC Lattès
Date de parution : 07 mars 2018

5 étoiles

#303 Un mariage anglais – Claire Fuller

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Le résumé…

Ingrid a 20 ans et des projets plein la tête quand elle rencontre Gil Coleman, professeur de littérature à l’université. Faisant fi de son âge et de sa réputation de don Juan, elle l’épouse et s’installe dans sa maison en bord de mer.
Quinze ans et deux enfants plus tard, Ingrid doit faire face aux absences répétées de Gil, devenu écrivain à succès. Un soir, elle décide d’écrire ce qu’elle n’arrive plus à lui dire, puis cache sa lettre dans un livre. Ainsi commence une correspondance à sens unique où elle dévoile la vérité sur leur mariage, jusqu’à cette dernière lettre rédigée quelques heures à peine avant qu’elle ne disparaisse sans laisser de trace.

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Mon avis…

Les mariages anglais sont de saison, en littérature aussi. Pourtant, rien à voir entre l’union d’Harry et Meghan et celle qui est relatée dans ce livre. Claire Fuller nous raconte ici la longue histoire d’un drame. Nan et Flora, les deux filles de Gil et Ingrid, sont bouleversées après l’accident de leur père. Il dit avoir vu leur mère, depuis la fenêtre de la librairie du village, sauf que celle-ci a été portée disparue depuis des années. On dit qu’elle s’est noyée en mer, elle qui était pourtant excellente nageuse. Flora refuse d’y croire. Le livre est partagé en deux trames romanesques. D’une part, il y a l’histoire de ces deux filles, qui doivent prendre soin de leur père atteint par des lubies de plus en plus étrange, bouleversé par sa rencontre avec le fantôme de son épouse. D’autre part, il y a celle d’Ingrid, la mère, qui raconte, dans des lettres qu’elle destine à Gil et cache dans les livres qu’il entasse dans leur maison, son coup de foudre puis son mariage avec lui, son professeur de littérature.

Claire Fuller nous raconte ici une histoire d’amour à la fois exceptionnelle et banale, comme toutes les romances, finalement. Elle en dessine les balbutiements, le paroxysme, la perfection, la passion, puis le déclin, les déceptions… Elle fait le portrait d’une femme déterminée, qui avait décidé de ne pas se laisser enfermer dans une vie dont elle ne voulait pas. Elle voulait faire des études, voyager, ne pas se marier ou avoir d’enfants (du moins, pas trop vite), avoir la liberté des hommes, être libérée du destin que l’on réservait à la plupart des femmes. Et pourtant, son histoire d’amour, sensuelle et romantique, avec son professeur de littérature, va la mener dans un mariage comme on en fait des centaines, un mariage anglais, tout ce qu’il y a de plus banal. Pourtant, malgré la « normalité » de ce qui est raconté, Claire Fuller nous fait ressentir la singularité des personnages, leur profondeur. Le récit est traversé de long en large par les multiples références littéraires. Le suspense n’est pas absent, malgré quelques longueurs. Le rythme du livre représente exactement la vie de ses personnages, une vie comme on pourrait en vivre, nous aussi.

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En quelques mots…

de la naissance au déclin de l’amour
traversé par la littérature
passionnant et bien écrit
l’histoire d’une femme
quelques petites longueurs
réalisme psychologique

Carte d’identité du livre

Titre : Un mariage anglais
Autrice : Claire Fuller
Traductrice : Mathilde Bach
Éditeur : Stock
Date de parution : 02 mai 2018

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