#306 La petite poule rouge vide son cœur – Margaret Atwood

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Le résumé…

« Le corps féminin type se présente muni des accessoires suivants : un porte-jarretelles, un panty, une crinoline, une camisole, une tournure de jupe, un soutien-gorge, un corsage, une chemise, une ceinture de chasteté, des talons aiguilles, un anneau dans le nez, un voile, des gants de Chevreau, des bas résilles, un fichu, un bandeau, une guêpière, une voilette, un tour de cou, des barrettes, des bracelets, des perles, un face-à-main, un boa, une petite robe noire, une gaine de soutien, un body en Lycra, un peignoir de marque, une chemise de nuit en flanelle, un teddy en dentelle, un lit, une tête. » Sur un ton drôlatique, vingt-sept façons de tordre la réalité, les croyances de chacun, les habitudes de chacune, ou l’art de se dévisser le cou pour se regarder droit dans les yeux. Un régal de mise en pièces de nos mythes, des plus anciens aux actuels, sans compter quelques utiles conseils ou recettes tels que Rendons grâce aux sottes et Fabriquer un homme.

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Mon avis…

Vous allez finir par être habitué(e)s à voir passer régulièrement Margaret Atwood sur ce blog. Depuis La Servante écarlate, j’ai lu d’autres de ses textes, parmi lesquels C’est le cœur qui lâche en dernier, bien plus cynique et décalé que le roman qui a inspiré la série télé à succès, ou encore le recueil de nouvelles Neuf contes, tout simplement excellent ! Et c’est justement charmée par cette dernière parution que j’ai décidé de m’aventurer dans un autre recueil de nouvelles d’Atwood, dont le titre est très intrigant : La petite poule rouge vide son coeur. Impossible de ne pas déceler dans ce livre le cynisme que j’avais adoré dans C’est le cœur qui lâche en dernier, et le féminisme particulièrement révolté qui se dessine dans La Servante écarlate.

Avec beaucoup d’humour, et souvent d’ironie, Atwood nous emporte dans de très très brèves histoires, parfois longues d’à peine deux ou trois pages, où elle nous fait le portrait d’un monde étrange qui ressemble drôlement au nôtre, sous certains aspects. Sous couverts d’allégories, de réécritures de contes ou de fables fameuses, elle critique avec subtilité la société patriarcale. Mon histoire préférée ? Une recette plutôt, intitulée « Fabriquer un homme ». Un épisode plein d’humour et complètement décalé, qui en dit beaucoup sur notre monde lorsque l’on sait lire entre les lignes. Margaret Atwood évoque les corps féminins, les poules (vous saurez deviner de qui il s’agit), mais aussi les coqs, et d’autres animaux. On y croisera aussi Blanche-Neige, le Petit Chaperon Rouge, ou carrément Ève, qui côtoie les mannequins des magazines féminins… Atwood opère une véritable déconstruction des mythes et des images qui ont forgé « la » femme, des plus anciens aux plus récents, et le tout avec le charme de la fiction enfantine.

Margaret Atwood se montre particulièrement malicieuse dans ce recueil étonnant et détonnant. Subtiles, ses histoires se lisent et se relisent. Ce sont de véritables textes à clés que nous livre l’autrice canadienne. Je trouve que ces nouvelles, contes ou fables, ces histoires courtes en somme, permettent d’approcher avec beaucoup de justesse la délicatesse mêlée de brutalité propre à la plume d’Atwood. Elle ne nous épargne rien, mais le fait avec une forme de douceur amère parfois désarmante. Surtout, ne vous arrêtez pas à La Servante écarlate, explorez bien plus de cette autrice unique, et pourquoi pas par le biais de ses recueils ?

Ô mon hypocrite lectrice ! Ma semblable ! Ma sœur ! Rendons grâce aux sottes qui nous donnèrent la littérature.

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Margaret Atwood

En quelques mots…

cynique voire désabusé
complètement décalé et perché
subtil et délicat
réécritures
à interpréter et à déguster

Carte d’identité du livre

Titre : La petite poule rouge vide son cœur
Autrice : Margaret Atwood
Traductrice : Hélène Filion
Éditeur : Le Serpent à Plumes
Date de parution : 12 octobre 1999

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Coup de cœur

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